EN GUISE DE PROLOGUE

 

Un jeune homme et une jeune femme se rencontrent à Florence. Ils ont tous deux une vingtaine d’années. Il se nomme Tristan. Elle se nomme Isolde. Tristan joue du violon dans les rues et Isolde fait des études de médecine. Elle est Allemande alors que Tristan est Français. Ils vont devenir ce qu’on appelle un couple et vont le rester plus ou moins pendant sept ans. Après quoi, ils se séparent. Bien des années après leur séparation, Isolde (devenue médecin à Londres) fait un séjour à Paris pour des raisons professionnelles. En cette occasion, elle habite chez Tristan. Un soir, elle lui propose d’aller faire des achats dans un sex-shop. Il accepte avec empressement. La pièce se déroule dans le sex-shop.

À PROPOS DU BARON

Dans La nuit sera calme, Romain Gary exprime le voeu de voir son personnage du Baron incarné sur une scène dramatique. Sous le coup d’une « overdose d’humanité », le Baron est anesthésié. Il se trouve dans un coma éthylique profond. De l’humanité, il pourrait faire sienne cette formule : « Ce n’est pas un homme, c’est pire. » On ne l’y reprendra plus. Toutefois son ivresse est très britannique ; il est impeccable depuis la pointe du soulier jusqu’en haut de son chapeau melon. Il n’y a pas le moindre faux-pli sur son costume Prince de Galles. Les contingences de l’humanité ne le touchent plus. « Démerdez-vous sans moi. » Désormais, il s’en lave les mains. Il m’a plu d’asseoir le Baron dans un sex-shop ; le cimetière de l’érotisme, le charnier des utopies… Dans l’industrie où le mystère est recyclé en mode d’emploi, où les tentatives ne sont que des ordonnances au profit du rendement maximum… dans le temple du réalisme… dans le purgatoire de notre temps.

 

L'auteur

 

 

EXTRAITS - Page 13

ESPACE SEX-SHOP

Le vendeur est occupé derrière le comptoir. À quelques pas de là, le Baron est assis face à la table sur laquelle on peut voir un verre. On dirait que cette place est occupée par le Baron depuis la nuit des temps. On ne le voit presque pas bouger. Tristan et Isolde viennent à peine de pénétrer dans le magasin.

ISOLDE, au vendeur : Bonsoir monsieur…

LE VENDEUR : Messieurs-dames…

ISOLDE : Vous avez des vibrateurs ?

 

(...)